L’esthétique occupe actuellement une place importante dans le secteur dentaire. C’est pourquoi un nombre croissant de dentistes recherchent des possibilités d’améliorer leurs compétences techniques pour le travail des composites. L’un des challenges les plus fréquents est l’hypersensibilité postopératoire. Quelles sont les principales causes de cette sensibilité postopératoire et comment pouvons-nous l’éviter ?
C’est essentiellement la sensibilité postopératoire suite à des restaurations de classe I et de classe II ainsi que chez les jeunes patients qui constituent un challenge relativement fréquent. Il est important de conserver la confiance du patient et, lorsque le patient est particulièrement jeune, d’entretenir également la confiance des parents. La cause doit être diagnostiquée avec soin, surtout vu que d’éventuels problèmes après la pose de la restauration peuvent uniquement être résolus en supprimant la restauration en question, pour ensuite intégralement la recommencer.
« Des études cliniques ont montré que les patients souffrent de diverses formes d’hypersensibilité après une restauration en composite, surtout dans les parties latérales. Il s’agit d’un problème connu, même lorsque la restauration ne présente pas de défauts visibles. La douleur constitue toujours un signal d’avertissement qui indique une éventuelle lésion. Et bien qu’il ne soit pas question d’un lien direct avec les processus pathologiques, la douleur est l’un des motifs les plus fréquents des traitements dentaires, autant dans les hôpitaux publics que dans les institutions privées." Source : Porto I, “Post-operative sensitivity in direct resin composite restorations: Clinical practice guidelines” (2012) Researchgate.
Nous vous présentons ci-dessous quelques-unes des principales causes d’hypersensibilité postopératoire et une série d’astuces afin de les éviter :
1. DENTINE TROP HUMIDE OU TROP DESSÉCHÉE APRÈS LE MORDANÇAGE AVEC LE SYSTÈME DE MORDANÇAGE TOTAL
Si la dentine reste trop humide, de petites bulles d’eau et autres résidus microscopiques du matériau d’obturation peuvent se loger dans les tubulis dentinaires. En cas de pression occlusive, ces petites bulles peuvent faire en sorte que du liquide dentinaire soit compressé en direction de la pulpe, ce qui provoque une hypersensibilité postopératoire. Lorsque la dentine est trop sèche, les fibres de collagène avoisinantes s’effondrent et il est difficile d’imprégner la dentine avec le matériau synthétique. Dans ce cas également, la mastication entraîne l’hypersensibilité de la dentition.
« Il n’existe pas de réponse simple à la question de savoir ce qui est ‘trop humide’ ou ‘trop sec’. Cela implique donc que les produits de mordançage total sont techniquement complexes. Dans des conditions de laboratoire sur une surface dentinaire plate, il est possible de réaliser une ‘surface humide’ relativement uniforme. En pratique, le praticien aura cependant tendance à assécher de trop les parois pulpaires ou axiales des cavités complexes, entraînant des accumulations d’humidité dans les angles axiaux et gingivaux. De ce fait, la surface dentinaire n’est pas régulièrement humidifiée et ne permet donc pas l’infiltration homogène du matériau synthétique.” Source : The Evolution of Dentin Bonding, Dentistry Today, Dr. Pashley
2. DENTINE MORDANÇÉE TROP LONGTEMPS
Le fait de mordancer la dentine trop longtemps peut entraîner une profondeur de mordançage trop élevée, de sorte que l’adhésif ne parvient pas à atteindre la structure saine de la dent. Des profondeurs d’environ 2 à 2,5 μm constituent la limite maximale au-delà de laquelle le mordançage provoquerait des creux qui peuvent entraîner une mauvaise adhérence ou une hypersensibilité des éléments dentaires. Utilisez toujours un produit de mordançage présentant une profondeur de pénétration limitée, même lorsque vous mordancez plus longtemps que les 15 secondes recommandées.
3. DURCISSEMENT INSUFFISANT OU TROP IMPORTANT
Dans le cas d’un durcissement insuffisant, seule une partie du matériau de scellement sera polymérisée, ce qui peut également provoquer une hypersensibilité. Il est important que votre lampe de polymérisation soit suffisamment puissante pour couvrir la distance totale entre l’extrémité de la lampe et le fond de la cavité. Utilisez des lampes de polymérisation puissantes de minimum 400 mW/cm², ou mieux encore, de plus de 1.000 mW/cm².
Une polymérisation trop puissante présente également des inconvénients. Une étude de 2006 (1) a examiné l’épaisseur de la couche d’inhibition d’oxygène qui se forme à différentes intensités de lumière auxquelles l’adhésif était exposé en-dessous de restaurations composites directes. L’adhésif a été durci plus longtemps que les délais recommandés par le fabricant, avec pour résultat une conversion plus importante, et une couche d’inhibition d’oxygène plus fine. Cette étude a révélé que dans le cas d’une couche d’inhibition d’oxygène plus fine, il était question de défauts entre la couche d’adhésif et le composite et, à l’inverse, qu’une couche d’inhibition d’oxygène trop épaisse présentait une meilleure adhésion au composite durcissant. Que doit-on en retenir ? Respectez toujours les directives du fabricant pour la durée de durcissement.
4. MORDANÇAGE DE DENTINE PLUS PROFOND À L’ACIDE PHOSPHORIQUE DANS DES RESTAURATIONS DE CLASSE I.
Tout comme avec les méthodes de mordançage total, de l’acide phosphorique est utilisé pour le mordançage de la dentine et la zone mordancée doit être rincée et séchée. Dans le cas d’une dentine plus profonde, un séchage trop important de la couche de collagène provoque l’effondrement des fibres de la dentine intertubulaire, ce qui fait que l’adhésif ne parvient pas à pénétrer correctement dans le tissu. Comme décrit précédemment, cet effondrement des fibres de collagène est l’une des causes les plus importantes d’hypersensibilité postopératoire. Avec les produits auto-mordançant, la profondeur de mordançage et la profondeur jusqu’à laquelle l’adhésif pénètre dans la dentine sont identiques. On évite ainsi que les fibres de collagène ne s’effondrent.
5. DURCISSEMENT AVANT QUE L’ADHÉSIF NE SOIT CORRECTEMENT APPLIQUÉ
Un laps de temps trop court pour l’application de l’adhésif peut entraîner une pénétration insuffisante du produit de scellement. Veillez à ce que le produit soit correctement appliqué et incorporé à la brossette et qu’il reste en mouvement. Il est également important de ventiler le produit avec de l’air, de sorte que le solvant puisse s’évaporer. Si la lampe de polymérisation est déjà utilisée avant que le solvant ne se soit évaporé, ceci peut entraîner l’arrêt précoce du durcissement qui est alors incomplet.